🍃 11 août
On se lève à 6h, après une nuit particulièrement mouvementée. On n’aura jamais le fin mot de l’histoire, mais une bestiole rôde autour de la tente, ce qui m’arrache un cri d’effroi alors que je sombre en plein sommeil. Je suis persuadée que l’animal est relativement gros, il frôle la tente et mes pieds et c’est très impressionnant. Au réveil, on en rigole, mais je passerai quand même la majorité de la nuit à me réveiller en sursaut dès que Celim se retourne. Par acquis de conscience, je demande à l’accueil du camping s’iels ont l’habitude que des animaux rôdent dans le coin ; il semblerait qu’il y ait des renards, mais cela n’a rien à voir avec mon hypothèse personnelle de sanglier voire d’ours. Bref, le mystère ne sera jamais levé.
On part donc très tôt avec la voiture, direction le refuge des Mouterres, sur le Plateau d’Emparis. Après avoir quitté la route principale, on s’embarque sur un petit chemin caillouteux, top pour les 4×4, un peu moins pour la vieille Opel. On mettra environ 30 minutes à accéder au refuge, non sans quelques frayeurs : la route est loin d’être large, et ça cahote dans tous les sens. Sans parler du vide sur notre droite : on est à flanc de colline et c’est vertigineux. On arrive tant bien que mal au petit parking, on s’habille (il fait frais à cette heure-ci, mais c’est vraiment salvateur en période de canicule), on mange un bout de brioche et on se met en route.
On traversera donc le Plateau d’Emparis sur quelques kilomètres. C’est joliment vallonné et la lumière dorée du matin règne en maîtresse dans l’atmosphère silencieuse. On aperçoit nos premières marmottes : émotion. Celles-ci seront néanmoins présentes tout le long du chemin, boules de poils furtives aux hurlements indiscrets. On croise un grand troupeau de moutons et on ne sait pas trop où se mettre ; est-ce qu’on attend qu’ils passent tous ? Ils n’ont pas l’air pressé. On leur laisse finalement le passage. On va ensuite longer, pendant quelques kilomètres des pâturages d’un vert tirant sur le bronze, laissant le petit chemin de terre nous guider par-delà les collines, le long d’un ruisseau. Puis, devant nous, se dresse, sombre, le point culminant de notre rando : le Pic du Mas de la Grave. On attaquera l’ascension tranquillement ; première “grosse” rando du séjour, on a décidé d’y aller à la cool ! Au bout de quelques minutes, je suis déjà à bout de souffle. La montée me semble infaisable, interminable. Nous croisons un petit groupe de randonneur.se.s en pause pipi ; on les dépasse, iels nous rattrapent plus loin. La pente est raide, le sol devient de plus en plus sombre ; on marche maintenant dans une terre noire, jonchée de rochers gris. Devant nous, le sommet qui semble ne jamais se rapprocher. Derrière, quand on tourne la tête vers l’endroit d’où l’on vient : un panorama ahurissant sur les glaciers et la Meije, enneigé.e.s à leurs sommets. C’est d’une beauté incroyable. Celim tente une échappée avec le meneur du petit groupe, et moi je fais une pause tous les dix mètres. J’ai la tête qui tourne, mes jambes ne veulent plus rien savoir, je pleure à chaque pas que je fais. Je finis par crier à Celim de continuer sans moi, en vraie bonne drama queen que je suis. Voyant que je ne changerai pas d’avis, Celim poursuit sur sa lancée. Je m’assois quelques minutes, je récupère, je sèche mes larmes. “Pas moyen qu’il le fasse sans moi”. Dans un élan venu d’on ne sait où, je rattrape mon retard, gravit les derniers mètres d’une traite et m’élance le long de la crête du sommet. Celim est là, quelques mètres plus loin, avec les randonneur.se.s : tou.te.s m’encouragent, je me sens portée, je vole presque. J’arrive à leur niveau et j’aperçois la tête dépitée de Celim lorsque je me rends compte que son nouvel ami s’obstine à l’appeler “Celem”. “Je lui ai dit plusieurs fois, il a pas eu l’air de comprendre.” Il a lâché l’affaire.
Arrivée au sommet, je relâche la pression. Le petit groupe nous quitte, on se retrouve tou.te.s les deux, à 3 000 mètres d’altitude pour un pique-nique bien mérité. Le panorama à 360° offre une vue dégagée sur le massif des Ecrins, les Grandes Rousses, la Savoie et le Mont Blanc, que l’on aperçoit entre deux nuages. En parlant de nuages, ceux-ci se rapprochent à une vitesse inquiétante : on remballe et on se casse, vite. La descente parait interminable, et ce n’est rien comparée aux 6 derniers kilomètres de plat jusqu’à la voiture. On est cassé.e.s en deux, on a l’impression de faire du sur place. Bilan : 22,5 kilomètres, 800 mètres de dénivelé positif et 8h de marche.
Autant te dire que la baignade dans la piscine du camping était plus que méritée à notre retour.